La lutte contre la corruption : cette urgence qui nous interpelle si peu

La lutte contre la corruption : un concept central dans le développement économique et social mais dont l’importance, hélas, semble difficile à appréhender sur le continent. S’il est facile d’indexer les dirigeants, il faut aussi se rendre à l’évidence : ces derniers sont à l’image de fractions importantes de populations aux destinées desquelles ils président. Parmi celles-ci, une intelligentsia africaine  qui brille par son incapacité à prendre la mesure de l’urgence de la lutte contre la corruption.

En effet, Il revient aux intellectuels  de porter, d’une part, la sensibilisation auprès des opinions publiques, et d’autre part, de jouer le rôle de vigile face aux dérives des élites.  Si les questions liées au genre, au  respect des deux mandats, etc., leur apparaissent de plus en plus comme essentielles, Il n’en est nullement de même pour la lutte contre la corruption. Cette thématique, quoi que centrale, occupe très peu de place dans la liste des causes qui leur tiennent à cœur.

Selon une étude récente de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 42% des faux médicaments dans le monde seraient envoyés en Afrique. D’après l’Ecole d’hygiène et de médecine  tropicale de Londres, les faux médicaments utilisés dans le traitement contre le paludisme causeraient environ 116 000 décès/an en Afrique au sud du Sahara. La situation est alarmante et révoltante, nous en conviendrons tous. Mais, elle n’est que la conséquence de la corruption. Car, la perméabilité des fonctionnaires à la corruption ouvre un véritable boulevard à ces faux médicaments. Entre le fonctionnaire de Police ou de Douane de ce port africain qui accepte de faire passer des cargaisons moyennant de l’argent, et le malade qui se fait administrer un médicament contrefait, le lien est souvent difficile à appréhender, surtout dans des sociétés fatalistes. Mais, même si la relation de cause à effet n’est pas directe, le  fonctionnaire corrompu est bel et bien à l’origine de la mort du patient qui se fera administrer de faux médicaments. Car, son intégrité aurait empêché les faux médicaments de se retrouver sur le marché.

Lutter efficacement contre la corruption demande une pédagogie et une sensibilisation sur  ces conséquences. Cette pédagogie et cette sensibilisation doivent être portées par les élites intellectuelles. La meilleure manière d’appréhender l’urgence de la lutte contre la corruption est de comprendre et faire comprendre ses conséquences insidieuses. Pour cela, il faudra que les relations de causes à effets entre les actes de corruption et certains problèmes puissent être facilement établies par les citoyens africains, comme dans le cas particulier du trafic de faux médicaments.

L’enjeu de la pédagogie et de la sensibilisation contre le fléau  reste de faire en sorte que tout un  chacun puisse voir comment les actes de corruption débouchent in fine sur nombre de difficultés sociales et sociétales. Nous avons choisi ici le cas des faux médicaments mais nous aurions pu en faire autant avec :-le népotisme qui rend les fonctions publiques et les armées de certains pays complètement inefficaces dans la réalisation de leurs missions. -les détournements de fonds qui privent les populations de ressources indispensables à la santé, l’éducation et la création d’emplois par exemple. Cela créé ce sentiment d’injustice sociale qui finit par être exploité par des groupes sectaires de tout bord, ou pousse la jeunesse dans des actes aussi désespérés que la traversée du Sahara et de la Méditerranées au péril de leur vie.

Diallo Mamadou

La plume d’Ishango pour ADN

 

 

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