Adieu Med Hondo
J’étais
encore tout petit
Quand
j’ai entendu parler de toi et de ton combat.
Je
ne pouvais guère imaginer, un jour, te côtoyer
Mystérieuse existence aux multiples
contorsions.
Sais-tu,
toi, le lion des dunes,
Ce que m’a procuré notre inopinée rencontre ?
Maintenant
que tu es parti
Je
le garde pour moi.
Je
ne sais point si, de là où tu es,
Tu
peux pénétrer les esprits
Pour
y lire des pensées
Et
déceler le secret des cœurs.
J’entends
parler de tout à propos de l’au-dela
Mais,
ici-bas, personne ne le saura
Bien que chacun ait le droit de se faire sa propre opinion.
Il
y a des âmes habitées par une indicible quête de justice.
C’est
pour cela que j’avais tant d’admiration pour toi.
J’aurais aimé que, sur nos terres,
Il
y ait quantité de Cheikh Anta Diop
Félix Roland Moumié, Patrice Lumumba,
Sembene Ousmane, Mongo Beti,
Thomas
Sankara, Nelson Mandela
Et tant d’autres.
Hélas! L’Afrique mère est maculée par la félonie.
Il
y a des êtres qui naissent au sein de peuples
Qui
savent peu apprécier la grandeur d’une âme.
Le
hasard a fait que tu es du pays des sables
Là
où tout est sable.
Là
où le vent emporte tout sur son passage
A
chaque jour nouveau.
Pour
un grand nombre de tes concitoyens
Rien
ne compte en dehors de l’immédiat gain
Et peu en importe la manière.
J’ai
vu, pour une dernière fois, ton visage
Et
il m’a semblé y avoir distingué une grosse balafre.
Est-ce
une illusion
Ou
un réel stigmate laissé par ton refus de l’injustice
Que seuls savent déceler ceux qui connaissent l’étendue de ta révolte.
Certains
peuples sont peu sensibles à l’injustice
Et
sont comme anesthésiés,
Leur
seuil de tolérance face à l’épouvantable est si élevé
Qu’il
tourmente ceux habités par la quête de l’équité.
Vouloir
changer le destin collectif,
Dans
ce contexte, devient éprouvant.
Il
n’y point de Martin Luther King sans compagnons de lutte.
Mais
comme on ne choisit point sa nature,
Il te fallait porter le fardeau de la solitude et de l’amertume.
Celui
qui croît au bien commun agit simplement
Dans
le but d’accomplir son devoir
Et
ne s’attend guère à une récompense
Seul compte l’accord avec soi.
Ainsi,
tu as vécu comme tu en avais envie.
Tu
laisses, sans y avoir peut-être pensé,
Derrière
toi, des frères et sœurs d’âmes
Un
jour ton continent t’élèvera.
Ce
n’est qu’une question de génération
Le
temps viendra où l’Afrique célébrera ses héros.
Va
donc, mon grand frère, en paix
Et délecte-toi de ton repos mérité
Oumar Diagne, écrivain